Le long du Rhin, de Bâle à Constance
Nous arrivons dans la vallée du Rhin à peu près en même temps que la dépression “Berndt”. Notre séjour en Allemagne commence donc de manière humide…
Les chemins en rive du Rhin sont inondés, lorsque nous nous éloignons de celui-ci pour prendre de la hauteur, les sentiers se transforment en torrents sous nos pas. Les affluents sont saturés, partout l’eau ruisselle vers le fleuve. La notion parfois abstraite de bassin versant est ici palpable.
Nous remontons le Rhin de Bâle à Constance. Les premiers jours, le gris du ciel se mêle à celui du bitume. Barrages hydro-électriques, grandes surfaces commerciales et zones pavillonnaires se succèdent.
Arrivés à Waldshut, nous quittons le fleuve sans regret, pour couper un méandre. Nous le retrouverons deux jours plus tard, à Schaffhaussen, sous un jour nouveau. La vallée est plus verte et escarpée. De village en village, nous découvrons de petits centres-ville médiévaux. Maison à colombage, façades décorées de fresques, inscriptions en écriture gothique au-dessus des portes, tout est extrêmement soigné.
Constance et son lac
Après une semaine de marche le long du Rhin, d’abord en Allemagne puis en Suisse, nous sommes à Constance. Nous décidons de nous y arrêter avant de repartir vers les Alpes. Deux jours de repos, qui se transforment vite en deux journées de visites.
Au programme deux sites classés au patrimoine de l’UNESCO.
Le premier est l’île de Reicheneau, située dans l’Untersee, partie inférieure du lac de Constance. Elle conserve les vestiges d’un monastère bénédictin, qui du IXe et le XIe siècle, eu un important rayonnement spirituel et artistique au sein du Saint Empire Romain Germanique.
L’église Saint-Georges dont l’intérieur est entièrement décoré de fresques de l’époque carolingienne est particulièrement remarquable.
Malgré sa proximité avec la ville de Constance et la digue qui la relie aujourd’hui à la terre ferme, l’île est restée peu urbanisée, essentiellement occupée par des cultures maraîchères et viticoles.
Le lendemain, nous remontons encore de quelques siècles dans l’histoire du lac de Constance et prenons un ferry pour nous rendre à Unteruhldingen. Une cité lacustre du néolithique y a été reconstituée. Celle-ci est divisée en trois hameaux, correspondant chacun à une époque et à un niveau de développement : l’âge de pierre, de bronze et de fer. Si les outils utilisés et les objets du quotidien sont radicalement différents, l’évolution des constructions est plus subtile. La maison s’agrandit, la charpente se complexifie, prend de la hauteur, mais les principes constructifs sont en grande partie inchangés. De 4000 à 700 av JC, pieux en bois, torchis, toit en chaume, traversent les âges.
Cette reconstitution ne prétend pas être parfaitement fidèle aux villages de l’époque, mais est un moyen d’expérimentation et de recherche pour les archéologues. La quantité de ressource et le temps nécessaire à la construction, sa résistance aux crus, sont autant d’éléments qui permettent de vérifier la vraisemblance des hypothèses faites sur la base de fouilles.
Après ce voyage temporel, nous reprenons notre voyage vers l’Est. Nous marchons le long du lac de Constance côté Suisse. En voyant les pavillons se succéder sur la rive, nous observons leurs points communs : portail, poubelle, tondeuse automatique, niche … comment l’archéologue de 10 000 interprètera-t-il ces signes ? Que pensera-t-il de l’homme de 2021 ? Comment ce dernier aura-t-il disparu ? Vengeance de robots, overdose de barbelés, le tout accéléré par le replacement de l’enfant par le caniche et le déambulateur pour tous ? Oui, on part loin, mais il faut bien s’occuper quand on a 5 000 km de marche devant soi !
Marie Epagneau